L’outarde houbara d’Afrique du Nord
Description
L’outarde houbara est un oiseau de taille moyenne dont l’envergure peut atteindre 1,5 mètre. Le poids moyen des mâles est de 2,2 kg contre 1,2 kg pour les femelles. Les adultes ont le ventre blanc et le dos brun pâle couleur sable, moucheté de noire. Le cou gris présente deux lignes latérales de plumes noires, érectiles, nettement plus longues chez le mâle. En vol, les ailes présentent de larges plages blanches et noires.
Comportement
Mouvements
L’outarde houbara est un oiseau cryptique et sensible au dérangement. L’espèce est un bon voilier, mais privilégie la marche et la course lors de ses déplacements et de sa prospection alimentaire. Elle s’alimente toute la journée, avec un pic d’activité au lever et au coucher du soleil.
La sous espèce des îles Canaries est sédentaire, alors qu’en Afrique du Nord, l’outarde présente une migration partielle et différentielle. Les mâles adultes sont majoritairement sédentaires avec des domaines vitaux bien délimités (17 km² en moyenne), alors que la plupart des femelles adultes présentent des mouvements saisonniers entre des aires de reproduction et d’hivernage distinctes (DV annuel > 140 km²) et une fidélité interannuelle à ces aires.
Des mouvements de 800 km ont été observés sur une femelles adultes suivie par satellite (ECWP, données non publiées).
Comportement reproducteur
L’outarde houbara est une espèce polygyne avec un système reproducteur de type lek-diffus. Les mâles se regroupent pour parader. Les femelles visitent les mâles uniquement pour la copulation et fertiliser leurs œufs. La femelle quitte ensuite le lek pour pondre, puis incube et élève seule les jeunes.
Les sites où paradent les mâles sont traditionnels et utilisés d’une année sur l’autre. Les mâles s’établissent sur un site à l’âge de 3 ans. La parade des mâles est très spectaculaire, destinée à attirer les femelles. Les longues plumes noires et blanches du cou, du poitrail et de la crête se dressent pendant que le mâle entame une marche lente, le bec dressé vers le ciel. Puis, il rabat sa tête en arrière sur son dos et entre dans une course frénétique, effectuant des lignes droites, des cercles et des zigzags. Dans cette posture, le mâle ressemble à une boule blanche et noire en mouvement visible à plus d’un kilomètre par ses congénères. En l’absence de femelle aux alentours, après quelques secondes, il s’arrête brusquement, au « garde-à-vous », la tête rentrée dans les épaules et produit une séquence de 2 à 8 émissions sonores à basse fréquence appelées « booming ». Puis, le mâle recommence un cycle de parade.
La parade s’étend de janvier à mai. Elle débute généralement dans l’après-midi et se termine au matin, évitant ainsi les heures les plus chaudes de la journée. Le jour, le mâle réalise des cycles de parades complets (courses et « booms » en posture statique), avec des pics d’activité au coucher et au lever du soleil. La nuit, le mâle poursuit sa parade en restant statique, ne réalisant alors plus que des « booms ».
En présence d’une femelle, le mâle effectue une parade pré copulatoire. Sa tête et son cou sont tendus vers l’avant, les plumes blanches et noires dressées. Le male avance vers la femelle effectuant un mouvement de balancier et claquant alternativement du bec, à droite, puis à gauche, etc.
Les femelles atteignent leur maturité sexuelle entre 2 et 3 ans. Elles pondent généralement de mars à juin, avec un pic fin avril. Cependant, la période de ponte est très variable d’une année sur l’autre, selon les conditions environnementales.
En Afrique du Nord, les femelles pondent de 1 à 4 œufs (moyenne = 2,47). Les œufs sont bruns, verts, olive, tachetés de brun sombre, et pondus à même le sol dans une simple dépression.
La période d’incubation est de 23 jours. La femelle et sa couvée quittent le nid quelques heures après éclosion du dernier poussin. Les poussins sont nourris à la béquée par la mère. Ils sont capables d’effectuer de petits vols à 30 jours, mais restent avec leur mère jusqu’à l’âge de 2 ou 3 mois.
Écologie
Houbara Habitat
L’espèce est parfaitement adaptée aux milieux semi-désertiques et se rencontre dans le pourtour nord du Sahara en dessous de l’isohyète 250mm. L’outarde houbara affectionne les plaines steppiques mais évite les ergs et les massifs montagneux. L’espèce est sélective dans son utilisation de l’habitat, et les besoins des deux sexes diffèrent en période de reproduction.
Les mâles s’alimentent dans les oueds et paradent sur le reg, sélectionnant les zones surélevées, avec une végétation rases (< 5cm) et au faible couvert (3%). Ces sites leur offrent une grande visibilité.
Les femelles pondent souvent à côté d’un buisson, pour se cacher, mais aussi pour protéger les œufs du vent et des radiations en leur absence. Les femelles au nid ou avec des jeunes sélectionnent des milieux hétérogènes, composés d’un réseau d’oueds traversant des regs à végétation moyenne (> 10cm). Ces milieux offrent de nombreuses caches pour les poussins et des ressources trophiques plus abondantes.
Le reste de l’année, à l’automne et au début de l’hiver, les mâles, femelles et juvéniles s’alimentent en groupes et affectionnent les oueds et les surfaces d’épandage fortement végétalisées.
Régime alimentaire
Adaptée aux environnements arides, l’outarde houbara ne boit pas. Elle s’hydrate au travers des plantes et animaux qui entre dans son régime alimentaire. L’oiseau est décrit comme omnivore, avec un régime majoritairement composé de plantes et d’arthropodes, mais aussi de petits vertébrés comme les lézards.
En automne et en hiver, les plantes représentent 60% du régime alimentaire de l’outarde houbara, avec une consommation principale des parties vertes d’Asteraceae, de Poaceae et de Chenopodiaceae. Au printemps et en été, les plantes ne représentent plus que 35% de son alimentation. L’outarde houbara se nourrit alors principalement de fourmis et de scarabées.
Statut et menaces
Au cours des trente dernières années, les chasses illégales d’outardes houbara (captures d’individus destinés au commerce) se sont accrues sur l’ensemble de son aire de distribution. Chaque année, ce commerce anéantit des milliers d’individus sauvages. Conjuguées à la dégradation de l’environnement, liée au surpâturage, à l’intensification de l’agriculture, et à la récupération des terres pour le loisir et le tourisme (Îles Canaries), ces pratiques sont à l’origine d’une importante régression des populations en Asie et en Afrique.
En conséquence de cette forte baisse de population, en 2004, l’Union International pour la Conservation de la Nature (UICN) a inscrit l’outarde houbara sur la « liste rouge » des espèces en voie de disparition, et l’a classée « Vulnérable ». Depuis, l’espèce est également mentionnée en Annexe I de la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d’extinction (CITES), ainsi qu’en Annexe I de la Convention sur les Espèces Migratrices (CMS).
Aujourd’hui, des données fiables sur les densités d’outrades houbara et leurs variations dans toute l’aire de répartition de l’espèce sont toujours insuffisantes, empêchant une planification adéquate de la conservation. Cependant, les récentes mesures de protection prises dans les Îles Canaries et au Maroc (Stratégie de conservation ECWP) ont permis une augmentation significative de la population. Mais des mesures de conservation semblables restent nécessaires à l’échelle de toutes les espèces.